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Extrait : Araignée des sables - Lettres à Hukala "le repos dans les prairies du rêve (parenthèses du cauchemar) ne surpasse guère sa découverte - ces chairs miroitantes ténébreuses des vitrines de mode la nuit qu'il pleut et qu'ils sont tous aux terrasses des Hilton du Sud - le coq de concours annonce le jeu des épées la famille te cache dans les caves de la troisième guerre mondiale on se fout de tout quand on attend vraiment de ne plus être et le petit frère parti dans des Bermudes des Bahamas des Cinghalaises avec ce qui te restait de reconquête - comment se lever se montrer parler aux jeunesses - et le texte peine dans les faux-plats du côté des villages jamais visités - fermes désertes qu'on aperçoit de loin entre les dahlias fanés des chapelles dont la grille bée - tabernacle gravé de l'araignée grise à pointes noires - des chiens hirsutes grondent nul ne les retient on avance à reculons vers les plus proches déserts un carrelage bleu au passage profond comme la mer chaude comme si quelque femme sommeillait là dans l'angle mort dans un panier de dentelles les mains sans tache sur des accoudoirs de vieux chêne et le front d'un ovale fascinant ceint de cette mélancolie sournoise des réclusions volontaires ensuite le sentier précipite vers le ruisseau des taillis pleins de détritus et de roches à vipères un homme brun de là-haut avec une fourche vous appelle ou vous chasse on voudrait vivement un café avec des rideaux clos un billard de la musique des habitués et une serveuse laide et délurée pour se moquer de la frayeur et de l'appétit - cependant qu'on colporte à mauvais gré le souvenir de celle qui fut mais c'est si loin si loin l'espérance le repos dans les prairies - Elvire Ava Mansour bêtes farouches dont les toisons frissonnantes enfièvrent Madigan réminiscence d'une fête sévère parmi les buis Hukala perfection de sa vie valse brève au centre du labyrinthe son regard de l'éclat métallique du vert les poisons de l'orchestre hautain sur son kiosque et le départ général soudain au milieu de la mélodie - dans les prairies proches de l'aurore quand ronflent les premiers autobus épuisent les ultimes ferveurs les idées enivrantes (zébrures d'orage) de l'insomnie ces levers d'oiseaux sur les lacs ces galops de chevaux derrière les murs des parcs et les syllabes qu'on pleure au réveil comme si le grand le suprême amour avait passé La Renaissance du livre, Bruxelles, 1979. |